Voyage autour
de ma Bibliothèque

Liste 28 : Littérature arabe : Les 1001 Nuits

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Les Mille et une Nuits  : les textes, les traducteurs, les manuscrits, les thèmes et les motifs et les récits cadres dans les ouvrages de ma Bibliothèque.


(voir l'étude détaillée sur mon site  Voyage autour de ma Bibliothèque , au tome 2, la note :    Les Mille et une Nuits, textes et traducteurs   )


Antoine Galland, le découvreur

N° 1421-23  Les Mille et Une Nuits, Contes Arabes  traduits par Galland, nouvelle édition préfacée par Gaston Picard, Classiques Garnier, édit. Garnier Frères, Paris, 1955. (Reliure demi-cuir bleu marine, dos lisse, titres et figurines dorés).
N° 3147-49  Les Mille et Une Nuits, Contes Arabes , traduits par A. Galland, édit. Ernest Bourdin, Paris, 1840, édition revue et corrigée sur l’édition princeps de 1704 et illustrée par les meilleurs artistes de France et de l’Etranger. Dissertation sur les Nuits par Sylvestre de Sacy. (Trois volumes. Reliure cuir d’époque, signée J. Butaud, 5 nervures, titres dorés).
N° 1079 Georges May :  Les Mille et Une Nuits d’Antoine Galland ou le chef d’oeuvre invisible , édit. Presses Universitaires de France, Paris, 1986 (reliure toile).
N° 1996 Mohamed Abdel-Halim :  Antoine Galland, sa vie et son oeuvre , thèse de doctorat, édit. A. G. Nizet, Paris, 1964 (reliure toile).
N° 1857-58  Journal d’Antoine Galland pendant son séjour à Constantinople (1672-1673) , publié et annoté par Charles Scheffer, édit. Ernest Leroux, Paris, 1881 (deux volumes reliés demi-percal, dos lisse orné).
N° 3231 Barthélémy d’Herbelot :  Bibliothèque Orientale, ou Dictionnaire universel, contenant généralement Tout ce qui regarde la connaissance des Peuples de l’Orient , édit. J. E. Dufour & Ph. Roux, Maestricht, 1776, une édition rigoureusement identique à l’originale qui date de 1697. L’ouvrage est un grand in-folio et compte 954 pages. D’Herbelot est mort en 1695. Galland a travaillé avec D’Herbelot et c’est lui qui a publié l’ouvrage. Comprend tout ce qu’on connaissait à l’époque en persan, turc et arabe. (Demi-veau havane, dos lisse orné, reliure de l’époque).
N° 3562  Album Mille et une nuits,  la Pléiade 2005

Pendant deux siècles et plus les Mille et Une Nuits ont fait partie des livres les plus lus de tout le monde occidental, tout de suite après la Bible et probablement avant Don Quichotte. Tout a démarré avec la parution des douze volumes de la version Galland qui s’est échelonnée de 1704 jusqu’en 1717 et qui a immédiatement rencontré un accueil enthousiaste.Galland aurait probablement préféré passer à la postériorité comme savant plutôt que comme traducteur de Contes arabes. Encore eût-il fallu qu’il écrive moins bien. Or, et c’est pour cela que Georges May parle de chef-d’oeuvre invisible, sa traduction est une véritable création littéraire.
Mais Galland n’a pas seulement un talent de conteur, il a eu en plus une chance inouïe : celle de tomber sur un manuscrit qui est reconnu aujourd’hui comme le plus ancien de tous ceux que l’on connaît (on y reviendra encore). C’est à Constantinople, dans les années 1680 qu’il découvre les Voyages de Sindbad et qu’il entend parler des Mille et Une Nuits. Et c’est un ami d’Alep en Syrie qui lui procure en 1701 ce fameux manuscrit sur lequel sont basés les neuf premiers tomes de son oeuvre. Nouveau coup de chance : Galland rencontre à Paris chez un ami voyageur un maronite d’Alep, un certain Hanna, qui parle aussi turc et français et qui connaît plein de « contes arabes fort beaux » qu’il raconte à Galland qui les résume. Et lui en remet un par écrit : celui d’ Aladin . Les contes transmis oralement sont ceux d’ Ali Baba , d’ Ali Coggia , du cheval d’ébène , du Prince Ahmed , des deux soeurs et toute une série de contes rassemblés sous le titre des aventures du calife Haroun al-Rachid. Or on n’a jamais trouvé d’autre manuscrit fiable ni d’Ali Baba et les Quarante Voleurs ni d’Aladin et sa Lampe Merveilleuse !
Antoine Galland était un homme modeste, intéressé surtout par l’étude, et qui a pourtant eu une vie assez extraordinaire. Né en Picardie (1646), d’un père petit artisan qui meurt quand son fils a quatre ans, sa mère devant travailler de ses mains pour subsister, cet homme devient - on a peine à le croire - un des grands orientalistes de l’époque, apprend déjà le grec et l’hébreu avec un chanoine de Noyon, vient à Paris à 15 ans, suit les cours pendant quatre ans d’un des plus fameux collèges parisiens où l’on utilise exclusivement le latin, puis entre au Collège Royal où son avidité de connaissances peut amplement se satisfaire, y apprend l’arabe parmi beaucoup d’autres matières telles que la philosophie, les mathématiques, la médecine, etc., puis accompagne un ambassadeur à Constantinople (il a 24 ans). Il va y rester 5 ans, y apprendre le turc et le persan, voyager en Terre Sainte, en Syrie et en Grèce, apprendre le grec moderne aussi, puis rentrer à Paris, devenir Numismate du Roi, repartir pour un court voyage à Messine et à Smyrne, et enfin partir à nouveau avec un nouvel ambassadeur en Turquie en 1679 et y rester 8 ans, enfin rentrer en France et travailler avec un autre orientaliste célèbre de l’époque, d’Herbelot, à une encyclopédie : la Bibliothèque Orientale , un ouvrage admirable, qu’il va d’ailleurs publier lui-même, d’Herbelot étant décédé…
Muhsin Mahdi, dont je vais parler plus loin et qui a fait un véritable travail de détective concernant les manuscrits et les éditions modernes des Mille et Une Nuits, estime que Galland s’est basé à 46% sur son manuscrit d’Alep en trois volumes que l’on trouve encore aujourd’hui à la Bibliothèque Nationale, à 4% sur son manuscrit de Sindbad, à 20% sur un ou plusieurs autres manuscrits qui semblent perdus aujourd’hui et à 30% sur les histoires transmises par Hanna, le fameux maronite d’Alep. En quelque sorte on peut donc dire que Galland est le créateur de ses Nuits.

Le Dr. Mardrus, deuxième traducteur français (et inventeur) des  Nuits  

N° 1412-19  Le Livre des Mille Nuits et Une Nuit , traduction littérale et complète du Dr J. C. Mardrus, illustrée par le fac-similé des miniatures, encadrements et enluminures qui ornent les manuscrits originaux persans et hindous, édit. Eug. Fasquelle, Paris, 1908-12. (8 volumes. Grand format. Reliure cuir, orné de dorures. Valeur 700 Euros en 1997).
N° 1077 Emile-François Julia :  Les Mille et une Nuits et L’Enchanteur Mardrus , Société Française d’Editions Littéraires et Techniques, Paris, 1935. (Reliure cuir dos, 5 nervures, titres dorés).
N° 2596  La Reine de Saba  selon le texte et la traduction du Dr. J.-C. Mardrus, Libr. Charpentier et Fasquelle, Paris, 1918 (Papier d’Arche, relié toile).
N° 2497 Dr. J. C. Mardrus :  Toute-Puissance de l’Adepte , transcription des Hauts Textes Initiatiques de l’Egypte, le Livre de la Vérité et de la Parole, édit. Bibliothèque Eudiaque, Paris, 1932 (avec dédicace de l’auteur. Demi-maroquin tête de nègre, plats recouverts de placage en bois, papier alpha, exemplaire numéroté) (c’est  le Livre des Morts  égyptien).
N° 2483  Le Koran qui est La Guidance et le Différenciateur , traduction littérale et complète des Sourates Essentielles par le Dr. J.-C. Mardrus, faite sur la demande des Ministères de l’Instruction Publique et des Affaires Etrangères, édit. Eugène Fasquelle, Paris, 1926. (Relié toile).
N° 3221 Lucie Delarue-Mardrus :  Mes Mémoires , édit. Gallimard, Paris, 1938 (la poétesse de la Revue Blanche qui a épousé le Dr. Mardrus dix jours après l’avoir rencontré).
N° 3222 Myriam Harry :  Mon amie Lucie Delarue-Mardrus , édit. Ariane, Paris, 1946, avec 4 photographies du Dr. Mardrus et 12 dessins de Lucie Delarue-Mardrus.
N° 4335 Sirieyx de Villers :  Lucie Delarue-Mardrus , édit. Sansot, Paris, 1923. 

La naissance et la jeunesse du Dr. Mardrus sont tout à fait dignes des Mille et Une Nuits. Sa famille est originaire de Mingrélie, qui est comme chacun sait une région située sur le bord de la Mer Noire, aux confins du Caucase. Le grand-père Mardrus, bien que chrétien, était l’allié du Grand Imam Schamyl cher à Alexandre Dumas. Ensemble ils se sont battus contre les Russes. Après une résistance de trente ans ils doivent quitter leur patrie. Schamyl va à La Mecque. Le grand-père Mardrus, avec une partie de sa famille, s’installe au Caire et y devient grâce à son amitié avec Schamyl, représentant du Chérif de La Mecque auprès du Khédive égyptien et des grandes puissances occidentales représentées au Caire. C’est là que naît celui qui sera connu sous le nom de Docteur Mardrus, en 1868. Il y passe sa jeunesse. Sa nourrice est une bonne musulmane, Aïcha, qui croit quand même aux djinns et aux maléfices, parcourt avec l’enfant les ruelles pittoresques du vieux Caire et lui transmet sa connaissance non seulement du parler populaire égyptien mais aussi de ses moeurs et de ses histoires. Arrivé à Paris il se marie avec la poétesse Lucie Delarue, dix jours après l’avoir rencontré à un dîner - c’est dire s’il avait du magnétisme !
Que disent les experts de la traduction de Mardrus ? Elisséeff : « Elle est très libre dans tous les sens du terme, mais malgré les critiques nombreuses, nous devons rendre cette justice que l’ouvrage est fort agréable à lire et n’est pas plus loin du texte arabe que la traduction de Galland, pour ne citer qu’elle ». D’autres connaisseurs disent la même chose. Au fond si Galland a créé avec sa traduction une oeuvre littéraire française du début du XVIIème siècle, le Dr. Mardrus a créé une oeuvre française du début du XXème.

René Khawam, troisième traducteur français

N° 1425-28  Les Mille et une Nuits , texte établi sur les manuscrits originaux par René R. Khawam, tome 1:  Dames insignes et serviteurs galants  - tome 2 :  Les Coeurs inhumains  - tome 3 :  Les Passions voyageuses  - tome 4 :  La Saveur des jours , édit. Phébus, Paris, 1986-87. (4 volumes reliés demi-cuir rouge, nervures, titres dorés).
N° 1432  Le Roman d’Aladin , texte intégral établi sur les manuscrits originaux par René R. Khawam, édit. Phébus, Paris, 1988.
On ne sait pas grand’chose de René Khawam. L’éditeur le présente comme Syrien, professeur, né à Alep en 1917.
N° 1429  Les Aventures de Sindbad le Marin , texte intégral, traduction sur les manuscrits originaux par René R. Khawam, édit. Phébus, Paris, 1985. (Reliure demi-cuir bleu marine, titres et filigranes dorés).
N° 1430  Les Aventures de Sindbad le Terrien , texte intégral, traduction sur les manuscrits originaux par René R. Khawam, édit. Phébus, Paris, 1986. (Reliure demi-cuir bleu marine, titres et filigranes dorés).
N° 1420  Sindbad the Sailor and other stories from the Arabian Nights . Illustrated by Edmund Dulac. Edit. Hodder & Stoughton, Londres. (24 illustrations en couleurs. Valeur 2500 Euros en 1993)
N° 2590  Relation de la Chine et de l’Inde , rédigée en 851, texte établi, traduit et commenté par Jean Sauvaget, édit. Société d’Edition des Belles Lettres, Paris, 1948. C’est en fait une édition bilingue du fameux  Livre de Soleiman , chronique de marchand écrite en 851 et qui a des rapports évidents avec les  Aventures de Sindbad  et même certaines aventures maritimes des  Nuits . Jean Sauvaget était Professeur au Collège de France.
Les Aventures de  Sindbad le Marin  sont plus anciennes que les Mille et une Nuits. Probablement contemporaines de la  Relation de la Chine et de l’Inde  qui date de 851. Ces aventures-là sont souvent terrifiantes.


Première traduction anglaise par E. W. Lane

N° 1463-5  The Thousand and one Nights, commonly called, in England, the Arabian Nights’ Entertainments , a new translation from the Arabic, with copious notes by Edward William Lane, illustrated from original designs by William Harbey, edited by his nephew Edward Stanley Poole, édit. Bickers and Son, London, 1877. (3 volumes. Edition originale. Reliure d’époque, titres et filigranes dorés).
N° 2695 E. W. Lane :  The Manners and Customs of the Modern Egyptians , édit. Everyman’s Library, Londres, 1936. (Lane a passé beaucoup d’années en Egypte. Avait l’habitude de voyager déguisé en Egyptien).
Il y a eu plusieurs traductions importantes des Mille et une Nuits en anglais au cours du XIXème siècle. Scott au début du siècle avait simplement traduit la version française de Galland. Lane, lui, traduit directement des manuscrits arabes. Il y ajoute de nombreuses notes. Il faut dire qu’il est assez imbu de sa bonne connaissance de la langue et des moeurs arabes. Par ailleurs c’est le plus chaste des traducteurs.


Le génial Richard Burton

N° 1466-75  The Book of the Thousand Nights and a Night , a plain and litteral translation of the Arabian Nights Entertainments, translated and annotated by Richard F. Burton, privately printed by the Burton Club, USA. (10 volumes. Complet avec les 6 volumes des  Supplemental Nights . Reliure cuir).
N° 1476-81  Supplemental Nights to the Book of the Thousand and one Nights  with notes anthropological and explanatory, by Richard F. Burton, privately printed by the Burton Club, USA. (6 volumes. Reliure cuir. Suite de la traduction de Burton. Nombreuses notes anthropologiques et culturelles de Burton).
N° 1485 Norman M. Penzer :  an annotated Bibliography of Sir Richard Francis Burton , preface by F. Grenfell Baker, édit. Burt Franklin, New-York, 1970. (Bibliographie essentielle pour l’œuvre de Burton. Intro de Grenfell Baker qui l’a connu).
N° 1484 Fawn Brodie :  un Diable d’Homme, Sir Richard Burton ou le Démon de l’Aventure , préface de Michel Le Bris, édit. Phébus, Paris, 1992. (Fawn Brodie était une ancienne Mormonne qui a également écrit l’intro au Livre sur les Mormons de Burton. Relié toile).
N° 1482 Fairfax Downey :  Burton, Arabian Nights Adventurer , édit. Charles Scribner’s Sons, New-York, 1931.
N° 2114-15 The Life of Captain Sir Richard F. Burton, by his wife Isabel Burton , with numerous portraits, illustrations and maps, in two volumes, édit. Chapman & Hall, Londres, 1893. (2 volumes. Reliure maroquin époque. Titres dorés. 1ère édition).
N° 1129  The True Life of Captain Sir Richard F. Burton, by his niece , Georgiana M. Stisted, with the authority and the approval of the Burton family, édit. D. Appleton and Company, New-York, 1897. (Défense de Burton par sa nièce. Attaque de l’épouse de Burton. 1ère édition américaine).
N° 3052-53  Personal Narrative of a Pilgrimage to Al-Madinah and Meccah by Captain Sir Richard F. Burton , edited by his wife Isabel Burton, Memorial Edition, édit. Tylston and Edwards, Londres 1893 (Œuvre la plus célèbre de Burton. 2 volumes).
N° 2928  The Search for the Source of the Nile : Correspondence between Captain Richard Burton, Captain John Speke and others , from Burton’s unpublished East African Letter Book, together with other related letters and papers in the Collection of Quentin Keynes, Esq., now printed for the first time and edited with a Biographical Commentary by Donald Young, The Roxburghe Club, Londres, 1999 (il s’agit de la fameuse controverse entre Burton et Speke sur les sources du Nil. 1ère édition, relié toile. Frontispice Richard Burton).
N° 1561-62  A Mission to Gelele, King of Dahome , with notices of the so-called Amazons, the Grand Customs, the Yearly Customs, the human sacrifices, the present state of the slave trade, and the negro’s place in nature, by Captain Sir Richard F. Burton, edited by his wife Isabel Burton, memorial Edition, Tylston and Edwards, Londres, 1893 (2 volumes. Figures et inscriptions arabes en or).
N° 1483  Love, War and Fancy - The Customs and Manners of the East from writings on The Arabian Nights by Sir Richard Burton , edited and introduced by Kenneth Walker, édit. William Kimber, Londres, 1964 (extraits des Supplemental Nights).
N° 1564  Selected Papers on Anthropology, Travel and Exploration by Sir Richard Burton , now edited with an introduction and occasional notes by N. M. Penzer, édit. A. M. Philpot, Londres, 1924 (1ère édition. Contient aussi la postface à  Falconry in the Valley of Indus , très rare, et  Notebook to Mecca ).
N° 3560  The City of the Saints and across the Rocky Mountains to California by Captain Sir Richard F. Burton , édit. Eyre and Spottiswoode, Londres, 1967 (introduction et notes par Fawn Brodie, biographe de Burton et du fondateur de la religion mormone Joseph Smith). 

Galland et Mardrus ont eu tous les deux des vies plutôt exceptionnelles. Galland était un grand érudit et c’est à lui que revient le mérite d’avoir découvert les Mille et une Nuits et même de les avoir créées en partie. Mardrus est un poète et c’est sa traduction qui conserve la faveur des lecteurs français. Mais avec Richard Burton on change de dimensions. Voilà un homme qui, en pleine période victorienne, arrive comme un homme de la Renaissance ou un homme d’aujourd’hui, braver tous les tabous, se révolter contre tous les corps établis et contre toutes les hypocrisies, armé d’une force de caractère terrible, d’une érudition étonnante, d’un talent de linguiste hors pair, établir les bases d’une véritable recherche ethnologique et partir à la découverte du monde sur tous les continents.
Que dire de sa version des Mille et une Nuits ? Mia Gebhardt (voir plus loin) prétend que sa traduction est un plagiat de la traduction d’un autre lettré de l’époque, John Payne, qui était d’ailleurs l’ami de Burton, un ami qui ne s’est jamais plaint, a mis sa traduction à sa disposition et était beaucoup plus prude que Burton. Elisséeff trouve que la langue utilisée par Burton est un mélange d’archaïsmes et de slang. Borges, qui admire l’homme Burton (il trouve qu’il pourrait assumer avec superbe les vers du Divan d’al-Motanabi : « Le cheval, le désert et la nuit me connaissent - Et l’hôte et l’épée, le papier et la plume. »), est plutôt critique sur sa traduction, surtout sur sa façon de rendre les vers, mais apprécie néanmoins la fantaisie de son style et conclut ainsi : « Un Anglais est toujours plus en dehors du temps qu’un Français. Le style hétéroclite de Burton a moins vieilli que celui de Mardrus qui affiche sa date. ». Il n’empêche que la traduction de Burton reste la plus lue en Angleterre, encore aujourd’hui, et que ses six volumes de notes prolifiques et encyclopédiques peuvent encore amuser le dilettante d’aujourd’hui.


L’opinion de Borges sur les traducteurs des  Nuits  

N° 2498 Jorge Luis Borges :  Oeuvres Complètes - Histoire de l’Eternité - Les Traducteurs des «Mille et Une Nuits» : le Capitaine Burton - le Docteur Mardrus - Enno Littman , édit. Pléiade - Gallimard, Paris, 1996 (contient aussi :  Evaristo Carriego ,  Fictions  et  Histoire de l’Infamie ).
Le livre de Borges est classé avec les autres livres de littérature hispano-américaine.


Les manuscrits. Les faux

N° 2296  The Thousand and One Nights (Alf Layla wa-Layla). From the earliest known sources . Arabic text edited with introduction and notes by Muhsin Mahdi James Richard Jewett, Professor of Arabic, Harvard University, Part 3 Introduction and Indexes, E. J. Brill, Leiden, 1994. (Il s’agit du Volume 3 contenant introduction et notes. C’est le seul en anglais. Les autres volumes sont une édition du texte arabe primitif).
Le bouquin de Mahdi est un vrai roman policier. Il y a dans les Nuits un corps relativement homogène qui est probablement l’oeuvre d’un auteur unique et qui correspond au manuscrit de Galland. Ce manuscrit date du XIVème siècle et provient de Syrie. Il y a d’autres manuscrits plus tardifs qui ont eux aussi un corps plus ou moins homogène mais légèrement différent et qui est originaire d’Egypte. Mais autour de ce centre sont venus s’agglomérer un tas d’histoires diverses par leur forme, leur provenance et leur date de composition. Et puis, à cause de Galland et de son succès tout le monde va chercher des manuscrits plus complets... et à défaut de les trouver, les fabriquer.


L’œuvre du Belge Chauvin

N° 1117 - 1120 Victor Chauvin :  Bibliographie des Ouvrages Arabes ou relatifs aux Arabes publiés dans l’Europe Chrétienne de 1810 à 1885 , édit. Institut du Monde Arabe, fac-simile de l’édition de l’Imprimerie H. Vaillant-Carmanne, Liège, 1892. Victor Chauvin, ancien avocat, devenu grand érudit en arabe et hébreu, Professeur à l’Université de Liège, a consacré 40 ans de sa vie à cette œuvre hors du commun. Les tomes IV, V, VI et VII sont presqu’entièrement consacrés aux  Mille et une Nuits  et aux traductions parues en Europe entre 1810 et 85. (Reliure toile).
La Bibliographie de Chauvin est classé avec les livres de littérature arabe. 


Autres contes arabes

N° 2262 - 64 René Basset :  Mille et un Contes, récits et Légenders arabes , édit. Librairie Orientale et Américaine - Maisonneuve Frères, 1924 (René Basset était Doyen de la Faculté de Lettres d'Alger. Tome 1 : Contes merveilleux - contes plaisants, Tome 2 : Contes sur l'amour et les femmes - Contes divers, Tome 3 : Les légendes religieuses. Les trois volumes reliés en toile).
N° 2256 René Basset :  Nouveaux Contes berbères , édit. Ernest Leroux, Paris, 1897 (Une première série de contes berbères avait été publiée par René Basset dix ans plus tôt. Ouvrage dédicacée à Gaudefroy-Demombines. Relié toile).
On a trouvé en Afrique du Nord des manuscrits relativement récents avec le titre de Cent et Une Nuits. Voir plus loin.

 

Les thèmes et motifs

N° 1078 Jamel Eddine Bencheikh :  Les Mille et Une Nuits ou la Parole Prisonnière , édit. Gallimard, Paris, 1988. (Relié toile).
N° 1424 André Miquel :  Les Dames de Bagdad, Conte des Mille et Une Nuits , présentation de Claude Brémond, suivi de La Nébuleuse des Contes, essai sur les premiers contes de Galland, Cl. Brémond, A. Chraïbi, A. Larue et M. Sironval, édit. Desjonquères, Paris, 1991. (André Miquel était Professeur au Collège de France. Relié toile).
N°1283 André Miquel :  Sept Contes des Mille et Une Nuits ou il n’y a pas de contes innocents , suivi d’entretiens autour de Jamaleddine Bencheikh et Claude Brémond, édit. Sindbad, Paris, 1987. 

Jamel Eddine Bencheikh était Directeur du Département des Etudes Arabes à l’Université de Paris-Vincennes. Il était aussi écrivain et linguiste et a beaucoup travaillé avec André Miquel.
J’ai lu avec beaucoup de plaisir la nouvelle traduction faite par André Miquel, qui est Professeur au Collège de France, du cycle de contes du portefaix et des belles dames de Bagdad. D’abord parce que ces contes qui viennent tout de suite après ceux du Marchand et du Génie et du Pêcheur et du Génie , sont extrêmement plaisants : on y décrit la richesse de la vie à Bagdad, Haroun al-Rachid fait son entrée dans l’histoire, on y trouve une des quatre scènes les plus érotiques (d’après Mia Gebhardt) de tout le recueil (les trois dames et le porteur se baignant nus à tour de rôle dans le bassin et faisant des plaisanteries grivoises sur leurs organes sexuels), mais aussi des histoires de métamorphoses animales, des histoires macabres (le premier des trois calenders borgnes raconte l’histoire d’un couple incestueux qui s’enferme dans un tombeau) et des aventures en terres lointaines (le troisième calender a vécu une histoire analogue à celle racontée par une des sept Princesses des Pavillons - une histoire de paradis perdu par manque de contrôle de soi - et rencontre pour la première fois la terrible Montagne Aimantée qui est le cauchemar des marins de Bassorah).Mais j’apprécie également l’essai de Miquel et la présentation de Claude Brémond qui est Directeur d’Etudes à l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales, parce que pour une fois voilà des essais qui se concentrent sur l’ancien coeur de l’ouvrage qui coïncide plus ou moins avec le Manuscrit de Galland. Car si on veut trouver une certaine unité à l’ouvrage et chercher s’il y a un auteur derrière tout cela, ce n’est évidemment pas une recension du XVIIIème siècle, faite de bric et de broc, qui en donnera la clé.
C’est le reproche que l’on peut faire à l’autre essai, celui des sept contes. Seule l’histoire de  Nûr ad-Dîn et de Chams ad-Dîn  (l’histoire des deux cousins unis grâce à des génies) fait partie du corpus des 280 Nuits de Galland.

N° 1098 Enver F. Dehoï :  L’Erotisme des «Mille et Une Nuits» , édit. Jean-Jacques Pauvert, Paris, 1961. (Bibliothèque Internationale d’Erotologie. Relié toile).
N° 1076 Michel Gall :  Le Secret des Mille et Une Nuits , édit. Robert Laffont, Genève, 1972. (Collection Enigmes de tous les temps).
Le Secret des Mille et Une Nuits est surtout axé sur l’hermétisme et les mythes.

N° 1995 M. Lahy-Hollebècque :  Le Féminisme de Schéhérazade, La Révélation des Mille et Une Nuits , édit. Radot, Paris, 1927 (collection Les Cahiers de la Femme. Relié toile).
Schéhérazade civilise Schariar, dit ce Professeur. Un peu simpliste, peut-être. Pourtant Schéhérazade est admirable.  Telle Antigone elle est prête à mourir pour son idée. Si, pour vaincre la force de l’homme la femme doit utiliser la ruse, elle peut aussi - et là je suis d’accord avec le Professeur - dévier l’impact de cette force primaire, en apprivoisant le fort par la culture, en l’éveillant à la beauté, à l’amitié, à l’amour, à la morale. Les Mille et Une Nuits peuvent donc bien être comprises comme un livre civilisateur transmettant des connaissances et enseignant un art de vivre.

N° 2771 Ferial Jabouri Ghazoul :  The Arabian Nights : a Structural Analysis , édité par Cairo Associated Institution for the Study and Presentation of Arab Cultural Values, Le Caire, 1980.
N° 2276 Nikita Elisséeff :  Thèmes et Motifs des Mille et Une Nuits, Essai de Classification , Institut Français de Damas, Beyrouth, 1949. (Relié toile).
L’étude d’Elisséeff est concise et très claire. Elle a surtout le mérite de faire pour la première fois, du moins à ma connaissance, une analyse des motifs et des thèmes présents dans les Mille et Une Nuits, un peu à la manière des analyses qui ont été faites, à une tout autre échelle, pour les contes et les légendes folkloriques européennes.

N° 2847 David Pinault :  Story-telling Techniques in the Arabian Nights , édit. E.J.Brill, Leiden, 1992. (Reliure cartonnée de l'éditeur).
N° 2487 Mia I. Gerhardt :  The Art of Story-telling, a literary study of the Thousand and One Nights , édit. E.J. Brill, Leiden, 1963 (Reliure cartonnée de l'éditeur).
C’est une merveilleuse étude littéraire des Nuits ! 

N°1851 André Clot :  Haroun al-Rachid et le temps des Mille et Une Nuits , édit. Fayard, Paris, 1986 (Relié toile).
Haroun al-Rachid apparaît dans plusieurs contes des Nuits.

N° 2412 Katharina Mommsen :  Goethe und 1001 Nacht , édit. Akademie-Verlag, Berlin, 1960 (Reliure toile).
Analyse des motifs et morales par Goethe. Influence des Nuits sur Goethe. Influence des Nuits sur le monde intellectuel de l’époque de Goethe


Les récits-cadres

N° 1080 Gaudefroy-Demombines :  Les Cent et Une Nuits , édit. E. Guilmoto Libr. Orientale et Américaine, Paris, 1911 (Relié toile). On a trouvé en Afrique du Nord des manuscrits (marocains) relativement récents avec le titre de Cent et Une Nuits. Cet ouvrage, largement étudié par Chauvin, commence par un récit-cadre légèrement différent de celui des Mille et Une Nuits : Le Roi de l’histoire demande à son vizir de lui trouver un homme beau, bon, intelligent et qui puisse lui servir de compagnon (en fait de mignon, je suppose). Gaudefroy-Demombines était Professeur à l’Ecole des Langues’O.

N° 2050 Emmanuel Cosquin :  Etudes Folkloriques, Le Prologue-cadre des Mille et Une Nuits , édit. Edouard Champion - Libr. Ancienne Honoré Champion, Paris, 1922.
C’est notre folkloriste Emmanuel Cosquin qui a étudié en détail le récit-cadre des Nuits. Il est composé de trois motifs : mari trompé - effrit joué - conteuse ingénieuse.

N° 1116 Zahiri de Samarkand :  Le Livre des sept vizirs , traduit du persan par Dejan Bogdanovic, édit. Sindbad, Paris, 1986 (Bogdanovic était Professeur à l’Ecole des Langues’O. Titre original : Sendbadnameh, le Livre de Sendbad. Ecrit au XIIème siècle en Transoxanie, à Samarcande, environ 1160). 

N° 2049  Essai sur les Fables Indiennes  par Loiseleur-Deslongchamps et  Le Roman des Sept Sages de Rome , publié par Le Roux de Lincy, libr. Techener, Paris, 1838 (édition originale. C’est la première traduction en langue française du Roman des 7 Sages. Reliure pleine simili-cuir).
Le Livre de Sindibad ou Livre des 7 Vizirs était déjà connu en Europe grâce à un récit italien : le Livre des Sept Sages de Rome 

N° 1115  Les Contes du Perroquet , texte persan traduit par L. Bogdanov, premier drogman de la Légation de France en Afghanistan, édit. Libr. Orientaliste Paul Geuthner, Paris, 1938 (Bogdanov était également Professeur de persan au Bengale et à Saint Pétersbourg).
Les Contes du Perroquet sont l’histoire hilarante de ce marchand qui, devant partir en voyage, confie l’honneur de son ménage à un perroquet. Celui-ci, chaque fois que la femme se prépare à sortir pour rejoindre son prince charmant, commence à lui raconter une histoire tellement prenante qu’elle retarde sa sortie, puis voyant qu’il est trop tard, remet sa rencontre amoureuse au lendemain.

N° 1336  Contes du Vampire , traduits du sanscrit et annotés par Louis Renou, édit. Gallimard, Paris, 1979. (Reliure demi-cuir bleu marine, titres et filigranes dorés)
N° 2105  Vikram and the Vampire, tales of Hindu devilry , adapted by Captain Sir Richard F. Burton and edited by his wife Isabel Burton, Memorial Edition, Tylston and Edwards, Londres, 1893.
Les Contes du Vampire sont basés sur un récit-cadre qui ne cherche pas tellement à retarder un événement mais à éduquer un roi. Celui-ci s’est engagé à rapporter à un magicien un cadavre suspendu à un arbre qui se révèle être un vampire (en fait une goule) doué de beaucoup d’humour.

N° 2051 à 2060  The Ocean of Story being C. H. Tawney’s translation of Somadeva’s Kathâ Sarit Sâgara , now edited with introduction, fresh explanatory notes and terminal essay by N. M. Penzer, Member of the Folklore Society, of the Anthropological Society and of the Asiatic Society, édit. Chas. J. Sawyer Ltd. Londres, 1924 (en 10 volumes. Penzer est le biographe de Burton. Le volume 9 contient une bibliographie. L’original,  Katha Sarit Sagara , date de 1070 environ. Reliure toile rouge avec dorures et figurines sur dos et couvertures).
N° 2674 Somadeva :  Océan des rivières de contes , La Pléiade-Gallimard, Paris, 1997
C’est la grande collection de contes hindous faite par Somadeva. D’après la Pléiade l’Océan aurait été écrit entre 1063 et 1081.

N° 0966-68  Contes de Boccace , illustrations de Jacques Wagrez, traduction et notes de Francisque Reynard avec une biographie de Boccace, édit. Jacques Tallandier, Paris (3 volumes. Reliure cuir, 5 nervures).
N° 0965  Vingt Contes de Boccace  traduits par Antoine Le Maçon, édit. Gibert Jeune, Paris, avec les délicieuses illustrations de Brunelleschi (16 hors-textes en couleurs, 19 dessins en noir et blanc. Tirage sur vélin, exemplaire numéroté, reliure simili).
Le Décaméron date de 1348-49. L’histoire se passe au moment où la peste ravage Florence.

N° 2286 – 89  Les Facétieuses Nuits du Seigneur J.-F. Straparole  traduits par J. Louveau et P. de Larivey, publiées avec une préface et des notes de G. Brunet et des dessins de J. Garnier, à la Librairie des Bibliophiles, Paris, 1882 (4 volumes. Très belle reliure d’époque, dos à 5 nerfs et coins. Inserts cuir vert et dorures).
N° 2069-70  Les Facétieuses Nuits de Straparole , trad. Jean Louveau - Pierre de Larivey, Bibliothèque Elzévirienne, édit. P. Jannet, Paris, 1857 (deux volumes).
Giovan Francesco Straparola de Caravaggio est moins connu. Il est plus tardif. Ses Nuits ont été publiées en 1550 et 53.

Les Contes de Boccace et les Nuits de Straparole sont classés avec les livres de littérature italienne

N° 0573  The Canterbury Tales  of Geoffroy Chaucer, a new modern English Prose translation by R. M. Lumiansky, édit. Washington Square Press, New-York, 1964.
N° 0577 Chaucer :  Les Contes de Canterbury , introduction par Floris Delattre, Professeur à la Sorbonne, édit. Montaigne-Aubier, Paris, 1942 (édition bilingue. Reliure demi-cuir, dos lisse).
Le cadre est le grand pèlerinage qui amène les foules de Londres jusqu’à la Cathédrale de Canterbury, où est enterré l’archévêque Thomas Becket, assassiné, martyr, et qui n’était pourtant pas particulièrement tolérant en matière de moeurs. L’histoire commence au printemps et annonce la force irrésistible de la vie , “when April with its gentle showers has pierced the March drought to the root and bathed every plant in the moisture which will hasten the flowering...”

Les Contes de Canterbury sont classés avec les livres de littérature anglophone