Voyage autour
de ma Bibliothèque

Liste 53 : Langues et linguistique

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Linguistique

N° 3249 Max Mueller :  Nouvelles Leçons sur la science du langage – Tome 1 : Phonétique et Etymologie , A. Durand er Pedone Lauriel, Paris, 1867 (Demi-veau violine, dos orné à nerfs (reliure de l'époque)  

N° 3250 Max Mueller :  Nouvelles leçons sur la science du langage -  Tome 2 : Influence du langage sur la pensée - Mythologie ancienne et moderne , A. Durand er Pedone Lauriel, Paris, 1867 (Demi-veau violine, dos orné à nerfs (reliure de l'époque)  

Il s'agit d'un cours professé à l'Institution Royale de Grande Bretagne en 1863. C'est la première traduction française effectuée par Mme Georges Harris professeure à Orléans et Georges Perrot professeur à Louis le Grand, docteur ès lettres et ancien de l'Ecole Française d'Athènes. Max Müller, né en 1823 et mort en 1900 était  linguiste, orientaliste et mythologue. Il était professeur à Oxford et a eu une influence certaine sur les théories de l'époque sur les mythes et les contes (en particulier sur l'Anglais Andrew Lang).


N° 1763  Le Langage , La Pléiade, 1968

Sous la direction et avec une préface d’André Martinet  


N° 1764 Roman Jakobson :  Essais de linguistique générale , Tome 1 :  Les Fondations du Langage , Editions de Minuit, 1978

Roman Jakobson, né en Russie, professeur à Harvard et au M.I.T., est un des Maîtres de la linguistique structurale


N° 1762  La linguistique , Libr. Larousse, 1977

Ouvrage collectif


Etudes générales

N° 3170 Canon Farrar :  Language and Languages , Longman’s Green & Co, Londres, 1878

Farrar était un des premiers linguistes. Sa théorie sur l’origine des langues : l’onomatopée

L’animal social qu’est l’Homme a toujours ressenti le besoin de communiquer avec ses semblables. Au début cela s’est fait par gestes, mimiques, cris. Et puis l’Homme a inventé le langage. Seul animal à réaliser cet exploit. Les premiers mots ont probablement été forgés sur la base d’onomatopées et de reproductions de bruits naturels : il y a toute une série de théories à ce sujet, beaucoup d’entre elles plutôt fumeuses. Le problème avec ce genre de théories c’est qu’à force de vouloir trop prouver on arrive à certaines absurdités : Kürcz (voir ci-après) trouve une origine de bruits naturels même dans la désignation des parties sexuelles de l’homme et de la femme ! Ceci étant il me paraît évident qu’une partie du vocabulaire humain, surtout à l’origine, avait une relation avec les sons produits par les objets nommés (je pense p. ex. au sifflement du serpent ou au bruit d’écoulement de l’eau). Et que d’autres mots imitaient des actes humains : on a souvent noté que les mots liés à l’allaitement maternel commençaient par des labiales : m pour mère dans presque toutes les langues : indo-européennes, chinoise, égyptienne, sumérienne, etc. Et que l’usage de ces labiales était même étendu au père ainsi qu’au bétail qui fournissait le lait quand la mère ne le pouvait plus. Il est d’ailleurs probable que l’origine « naturelle » d’une petite part de notre vocabulaire explique que l’on trouve quelquefois des racines de mots semblables dans des familles de langues qui n’ont à priori aucun rapport entre elles. Ce qui n’empêche certains linguistes sérieux à penser qu’il existait à l’origine une langue humaine commune, une sorte de matrice (voir également plus loin).


N° 2618  Der naturlautliche Ursprung von Sprache und Schrift aus sumerischen, aegyptischen und chinesischen Schriftbildern  von Leopold Kürcz, bearbeitet von Richard Hadl, édit. Verlag der Offizin Richard Hadl, Leipzig, 1930

L’origine des « bruits naturels » dans le langage…

N° 2404 Leonard Bloomfield :  Language , Henry Holt & Cy, New-York, 1958

Professeur à l’Université de l’Illinois. Etude très complète, reprint de celle de 1933, basée sur une première publication qui date de 1914 :  Introduction to the Study of Language .  


N° 3618 Mario Pei :  Histoire du Langage , Payot, 1954

 Origines du langage - éléments constitutifs - fonctions sociales - langues du monde - langue internationale  .

Mario Pei était professeur à l'Université Columbia.


N° 1759 Ernest Renan :  De l’origine du langage , Calman-Lévy, Paris

Essai paru pour la première fois en 1848

 

N° 2512 Merritt Ruhlen :  L'origine des Langues , Belin, 1997

Sous-titre :  Sur les traces de la langue mère . Préface d'André Langaney, directeur du Laboratoire d'anthropologie biologique du Musée de l'homme. Voir l'original ci-après. On voit que le sous-titre de l'original est différent : «  Studies in Linguistic Taxonomy  ».

N° 3401 Merritt Ruhlen :  On the Origin of Languages - Studies in Linguistic Taxonomy , Stanford University Press, Stanford, Californie

L’invention du langage remonte trop loin dans le temps pour qu’un linguiste sérieux perde son temps à chercher à l’élucider. Pourtant des gens très sérieux ont essayé d’élaborer des hypothèses : Renan, Grimm, Max Müller, Canon Farrar, etc. Et encore tout dernièrement ce Merritt Ruhlen qui n’est quand même pas n’importe qui puisqu’il enseigne la linguistique à l’Université de Stanford aux Etats-Unis a osé braver toute la communauté scientifique en prétendant que toutes les langues actuellement parlées dans le monde sont toutes les descendantes d’une seule langue ancestrale.

 

N° 2559 Robin Dunbar :  Grooming, gossip and the evolution of language , Faber and Faber, Londres/Boston, 1996

Dunbar était Professeur de Psychologie à l’Université de Liverpool et Professeur d’Anthropologie biologique à l’University College de Londres.


N° 2303 Luca Cavalli-Sforza :  Gènes, Peuples et Langues , Odile Jacob, Paris, 1996

Cavalli-Sforza était Professeur à l’Université de Stanford. Connu pour ses recherches en génétique, il s’est intéressé notoirement aux rapports entre évolution génétique et évolution culturelle, à la consanguinité, aux problèmes de l’inné et de l’acquis, etc.


N° 1760 Claude Hagège :  L’Homme de paroles , Fayard, 1985 (relié toile)

N° 1761 Claude Hagège :  Le Souffle de la Langue. Voies et destins des Parlers d’Europe , Odile Jacob, 1992

N° 1776 Claude Hagège :  Le Français et les Siècles , Odile Jacob, 1987

Claude Hagège était Professeur de Linguistique à l’Université de Poitiers et Directeur d’Etudes à l’Ecole Pratique des Hautes Etudes. D’origine tunisienne, grand polyglotte, grand passionné, a énormément publié.  


Langues

N° 2765 et 2766 Emile Littré :  Histoire de la Langue française , Didier et Cie, Paris, 1863 (relié cuir bleu marine dos à nervures)

Emile Littré (1801 – 1881), de l’Institut, est l’auteur du fameux  Dictionnaire . Les Essais rassemblés ici sont centrés sur la formation de la langue au Moyen-Âge et sur la littérature des XIIème et XIIIème siècles. 


N° 2462 A. Meillet :  Aperçu d'une Histoire de la langue grecque , Hachette, 1930 (relié toile)

N° 2463 A. Meillet :  Esquisse d'une Histoire de la langue latine , Hachette, 1928 (relié toile)

N° 2464 A. Meillet :  Introduction à l'Etude comparative des Langues indo-européennes , Hachette, 1937 (relié toile)

Antoine Meillet (1866 – 1936) était un précurseur de la linguistique française. Professeur de Grammaire comparée au Collège de France, il a également fait des cours ou publié des études sur la structure des langues indo-européennes, sur le vieux-slave, l’iranien, l’arménien, etc. Georges Dumézil et Charles Haguenauer étaient ses élèves.


N° 2580 William J. Entwistle :  The Spanish Language, together with Portuguese, Catalan and Basque , Faber and Faber, Londres, 1948

Entwistle était Professeur d’études ibériques à Oxford.


N° 3414 Paul Teyssier :  Comprendre les langues romanes , Libr. Portugaise-Chandeigne, Paris, 2004

Sous-titre :  Du français à l'espagnol, au portugais, à l'italien et au roumain . Méthode d'intercompréhension. Résultat d'un travail collectif dont l'idée originale revient à un professeur danois : Jorgen Schmitt-Jensen. Système utilisé pour faciliter l'intercompréhension entre Danois, Suédois et Norvégiens.


N° 1769 Albert Dauzat :  L’Europe linguistique , Payot, 1940

Avec 16 Cartes linguistiques. Dauzat (1877 – 1955), spécialiste en anthroponymie et toponymie, a aussi publié des études sur les patois. 


N° 1886 Georges Cerbelaud Salagnac :  Les origines ethniques des Européens , Perrin, Paris, 1992 (relié toile)

Salagnac, membre de l’Académie des Sciences d’Outre-mer, historien, ethnologue et linguiste, était spécialisé dans les questions ethniques


N° 1767 F. Mossé :  Esquisse d’une Histoire de la Langue anglaise , Edit. IAC, Lyon, 1947

F. Mossé était Directeur d’Etudes à l’Ecole Pratiques des Hautes Etudes.

La situation de la langue anglaise est assez particulière dans le domaine européen. C’est que l’anglais, sur une base germanique (Angles et Saxons), déjà enrichie par des apports scandinaves, a été obligé de greffer un nombre extrêmement élevé de mots français suite à l’invasion normande. Mais Mossé montre que l’anglais ne s’est pas contenté d’accueillir des mots français mais s’est également ouvert à d’autres langues comme l’allemand et, d’une manière presque illimitée, aux mots latins et grecs, au point que l’on a estimé qu’un cinquième seulement du lexique total est d’origine indigène. Il est vrai que le lexique est immense : 240000 mots contre 70000 en allemand et 90000 en français, mais il y a énormément de mots désuets et le langage courant, par contre, utilise en majorité des mots indigènes.


N° 2666 Friedrich Kluge :  Deutsche Sprachgeschichte , Verlag Quelle und Meyer, Leipzig, 1920

Sous-titre :  Werden und Wachsen unserer Muttersprache von ihren Anfängen zur Gegenwart 

Célèbre Histoire de la langue allemande depuis le Moyen-Âge jusqu’aux temps présents. Kluge a enseigné aux Universités d’Iéna et de Fribourg


N° 2647 R. A. D. Forrest :  The Chinese Language , Faber and Faber, Londres, 1965

La langue chinoise est une langue tout à fait spéciale. Sans vouloir faire un long cours sur ce sujet, notons simplement que le chinois n’a que des mots monosyllabiques (sauf les mots composés bien sûr) et que ces mots sont invariants. Pas de flexion, pas d’articles. Le même mot peut être nom ou verbe. Même un adjectif peut être utilisé comme nom ou comme verbe et dans tous les cas comme un adverbe. Pas de préposition. Alors évidemment pour compenser tout cela il y une syntaxe assez rigide : p. ex. le verbe est toujours placé après le sujet, il y a des expressions pour marquer le futur ou le passé, on utilise beaucoup de circonlocutions, le nombre de mots composés a considérablement augmenté avec le temps et surtout, comme le nombre d’homonymes est extraordinairement élevé, il a fallu les distinguer entre eux par des tons : quatre en mandarin classique, six en cantonais.


N° 2648 Roy Andrew Miller :  The Japanese Language , The University of Chicago Press, Chicago/Londres, 1970

En principe les langues japonaise et chinoise n’ont rien en commun, l’une étant originaire de l’Asie du Nord-Est et plutôt liée aux langues mongoles et l’autre étant une langue tout à fait particulière, entièrement monosyllabique et sans flexions. Et pourtant, si on passe quelque temps au Japon, on se rend rapidement compte que l’on y trouve effectivement de nombreux mots chinois, comme p. ex. le chiffre trois : san. C’est que les Japonais, en empruntant le système d’écriture chinois, avaient en même temps adopté le nom chinois du symbole en question, l’intégrant tout simplement dans leur vocabulaire (en le japonisant au besoin). Ce qui fait que presque chaque caractère du type idéogramme a, en japonais, deux prononciations, l’une d’origine chinoise (les on-yomi), l’autre de souche japonaise (les kun-yomi).Roy Andrew Miller dit qu’en théorie le japonais pourrait accueillir en son sein n’importe quel mot chinois. Une telle disposition à accueillir des mots d’une langue étrangère est extrêmement rare. Elle est évidemment liée à la manière avec laquelle le Japon a reçu et intégré dans le passé non seulement l’écriture mais aussi la culture et le bouddhisme chinois.

N° 2637 à 2639  Etudes Choisies de Charles Haguenauer, vol. 1 Japon - Etudes de Linguistique , vol. 2 Japon - Etudes de religion, histoire, littérature, vol. 3 Ryuku/Formose - Histoire et ethnologie, édit. E. J. Brill, Leiden, 1976/77.

D’où viennent les Japonais et d’où vient leur langue ? Charles Haguenauer qui a créé le Centre d’Etudes Japonaises et Coréennes qui fait partie aujourd’hui des Instituts d’Asie du Collège de France, a conduit de nombreuses recherches ethnologiques et linguistiques sur le Japon et la Corée. Un grand nombre de ces études ont été rassemblées par ses élèves pour lui rendre hommage lors de son 80ème anniversaire en 1976. Dans une étude qui date de 1952 concernant la langue japonaise, il dit que « des groupements hétérogènes, altaïques (toungouzes ?), coréens, aïnoïdes, peut-être aussi indonésiens, mais qu'on est dans l'impossibilité de déterminer, ont dû contribuer à la formation de la population qui occupe l'archipel ».

N° 2921 C. Melvin Aikens et Takayasu Higuchi :  Prehistory of Japan , édit. Academic Press Inc., San Diego, USA/ Londres, 1982.

 Prehistory of Japan  est une étude à la fois ethnologique, linguistique et archéologique faite par l’anthropologue Aikens de l’Université de l’Oregon et par l’archéologue Higuchi de l’Université de Kyoto. Aikens et Higuchi considèrent qu’il y a eu une grande continuité dans le peuplement des îles japonaises ; Japonais et Aïnous y sont depuis des milliers d’années ; ils ne pensent pas que les Aïnous étaient les seuls occupants initiaux et n’ont donc pas été écrasés et chassés par les Japonais ; les Japonais ont un type mongoloïde assez proche de leurs voisins coréens et chinois du Nordmais leur langue est altaïque et non « sinitique » et a des relations avec le coréen, le toungouze-mandchou, et même le mongole et le turc ; la séparation entre langue coréenne et langue japonaise remonte à au moins 5000 ans (on a développé une méthode scientifique appelée glotto-chronologie pour dater ce genre d’événements); il existe certaines relations avec les langues malaises-polynésiennes ; et même des relations avec la langue des Aïnous (une langue complètement isolée mais c’est encore le japonais qui en serait le plus proche). Je me méfie un peu de certaines de ces théories, en particulier de celles qui concernent l’histoire du peuplement des îles japonaises. Je me demande si on ne cherche pas à prouver à tout prix que les Japonais ont toujours été là, à brouiller leurs origines et à montrer que l’on n’a pas brimé les Aïnous…

Pour la langue japonaise voir aussi mon Voyage autour de ma Bibliothèque, Tomeb 3 : Langue et écriture.


Langues régionales


N° 3557 à 3559 Louis-Philippe Geoffrion :  Zigzags autour de nos parlers , trois volumes, Geoffrion, Québec, 1924

Le parler français du Canada. Préface de  M. le Juge Adjutor Rivard de la Société Royale du Canada. Geoffrion est secrétaire de la Société du parler français au Canada.  


N° 2140 H. Giordan :  Les Minorités en Europe , Editions KIME, Paris, 1992

Ouvrage collectif

N° 2141 H. Goetschy et André-Louis Sanguin :  Langues Régionales et Relations Transfrontalières en Europe , L’Harmattan, 1995

Ouvrage collectif suite à un colloque tenu à Colmar en juin 94

Le Sénateur Goetschy s’est beaucoup battu à la fois pour la préservation du dialecte et pour le bilinguisme. Il fait souvent appel aux conventions et déclarations internationales qui sont censées protéger les droits culturels des minorités. Il organise des colloques comme celui qui a eu lieu à Colmar en 1994. Cela a l’avantage de montrer qu’il existe d’autres minorités linguistiques en Europe et donc d’autres cas de bilinguisme ou de multilinguisme, en-dehors des plus connus tels que Basques et Catalans en France et en Espagne, Germanophones, Corses et Bretons en France, Gallois en Grande-Bretagne, Suédois en Finlande, Lapons en Suède, etc. A Colmar on a évoqué des cas moins souvent traités : Finno-Ougriens en Russie, Germanophones en Pologne et en Italie, Slovènes en Autriche, Albanophones en Italie encore, etc. Et la liste est loin d’être finie. On voit les problèmes posés aujourd’hui par la présence de nombreux Russophones en Estonie, mais aussi dans beaucoup d’autres pays de l’ancienne Union Soviétique, ou par les Magyars en Roumanie et en Serbie, les Turcophones en Bulgarie, les Germanophones en Roumanie encore, sans compter les Tsiganes présents dans tous ces pays.

Henri Giordan, du CNRS, qui présidait un autre colloque, organisé en 1990 au Conseil de l’Europe à Strasbourg, et qui portait sur les droits linguistiques et les droits de l’Homme, estime qu’il existe rien qu’en Europe de l’Ouest et du Sud 19 langues minoritaires qui n’occupent nulle part de position dominante dans la société où elles se trouvent. Et encore il ne compte pas parmi elles les dialectes alsaciens et lorrains parce qu’il considère qu’ils font partie de la langue allemande.


N° 1766 Dr. Oskar Weise :  Unsere Mundarten, ihr Werden und ihr Wesen , B. G. Teubner, Leipzig/Berlin, 1910

L’ouvrage de Weise sur la nature des dialectes allemands est intéressant à plusieurs titres. Au moment où Weise écrit, en 1910, tout l’Empire allemand était encore divisé en une multitude d’aires linguistiques différentes les unes des autres. Les familles linguistiques sont nombreuses. Weise énumère près de 80 sous-groupes appartenant à une dizaine de grandes familles : alémanique, souabe, bavarois-autrichien dans le sud, francique, thuringien-haut-saxon et moyen-allemand oriental en Moyenne-Allemagne, bas-francique, bas-saxon et bas-allemand oriental dans le Nord. L’incompréhension entre dialectes règne. C’est pourquoi, les locaux qui doivent communiquer avec des Allemands d’une autre aire linguistique, utilisent ce que l’on appelle la « Umgangssprache », la langue de communication, et qui est une espèce de langue « moyenne » entre haut-allemand (hochdeutsch) et le dialecte local. Dans le Nord, dit Weise, cette Umgangssprache est plus proche du haut-allemand, tout simplement parce que les gens ont pratiqué leur dialecte, leur « platt » dans leur jeunesse avec les copains, le connaissent encore, mais ne le pratiquent plus et le laissent à l’usage du bas peuple, alors que dans le Sud tout le monde (c. à d. toutes les classes sociales) continue à parler son dialecte d’une manière régulière. Et c’est encore pas mal le cas aujourd’hui, surtout dans des régions aussi attachées à leurs traditions que la Bavière ou la Suisse.

Weise nous apprend aussi que l’on avait déjà commencé à créer des lexiques de dialectes dans le nord de l’Allemagne dès la fin du XVIIIème siècle. Dans le sud le premier lexique est bavarois : c’est celui de Chr. Schmeller (1827 - 1831) qui a servi de modèle au grand lexique des dialectes suisses ( Schweizerisches Wörterbuch ) établi d’une manière nettement plus scientifique et plus méthodique, en 1881, par Staub et Töbler chez l’éditeur Frauenfeld. C’est sur ce lexique que s’est appuyé à son tour Martin pour créer le lexique des dialectes alsaciens. Comment compile-t-on un lexique de dialectes ? Pas facile, puisque les dialectes varient très rapidement d’un lieu à un autre. Weise dit qu’ils changent « toutes les 5 minutes », diffèrent d’un village à un autre, d’une génération à une autre, souvent d’une religion à une autre et bien sûr en fonction des limites politiques des différentes régions (limites qui étaient nombreuses en Allemagne : on se souvient qu’on avait encore 25 dynasties princières en 1870). Ce qui veut dire que même si on ne veut recueillir que les mots d’une aire linguistique définie, ces mots varient d’une extrémité de la zone à l’autre. Pour classer les mots on ne peut donc pas suivre un simple ordre alphabétique, mais on va s’appuyer sur les phonèmes car par chance dans les langues germaniques les phonèmes ont des éléments fixes qui sont les consonnes. Seules les voyelles sont variables. Encore qu’il y ait quelques exceptions en ce qui concerne les consonnes : ainsi l’alsacien ne fait guère de différence entre D et T et entre B et P, ces consonnes doivent donc être groupées ensemble. C’est ce qui explique l’ordre des consonnes placées en tête de chaque volume.

Le Professeur Weise fait un véritable panégyrique du dialecte. Le dialecte n’a pas de termes abstraits, dit-il, mais il compense très bien ce manque par d’autres qualités. Le dialecte aime la métaphore, l’image. Le parler populaire préfère employer la comparaison plutôt que l’adjectif, la comparaison lui est naturelle, et elle est toujours expressive. Il préfère le style actif au passif, le verbe à l’adjectif. Et quand il emploie l’adjectif il le renforce, le double, en intensifie la qualité. D’ailleurs le dialecte pratique l’exagération. Le dialecte pratique l’humour, la moquerie. Le dialecte aime le concret. Il veut être clair. Il veut que cela ait du sens. Il est direct. Il n’aime pas les longues phrases du haut-allemand, les subordonnées qui suivent les principales et qui rejettent leur verbe à la fin. Le dialecte n’utilise pas de circonlocutions pour parler des choses du corps (ce n’est que pour parler de surnaturel, de Dieu, du diable, qu’il est prudent et préfère ne pas les désigner directement). Le vocabulaire du dialecte est riche. Il sait nommer tout ce qui fait son environnement (Weise dit qu’on a dénombré dans les différents dialectes allemands 24000 mots pour désigner 2000 plantes !). Il possède plein de synonymes. De plus il crée des mots, surtout par l’imitation de sons, par onomatopées, ce qui explique peut-être cette richesse en verbes qui caractérise la langue allemande (et qui devrait inciter, il me semble, les linguistes qui cherchent à comprendre l’origine du langage à étudier la formation des mots dans les dialectes). Enfin, comme le dialecte est très conservateur, il conserve des mots anciens, des sens anciens de mots actuels et, également des prononciations anciennes.


A propos des langues régionales, dialectales et du multilinguisme et du livre passionnant de Oskar Weise, voir mon Voyage autour de ma Bibliothèque, Tome 3 : Culture régionale, dialecte alsacien, bilinguisme, multilinguisme.


N° 3150 Salcia Landmann :  Jiddisch, das Abenteuer einer Sprache , Walter Verlag, Olten/Freiburg, 1962

Tout le monde sait que le yiddish a une structure germanique (en français on parle même de judéo-allemand). Mais ce que beaucoup de gens ignorent sans doute c’est que la présence de termes hébreux ou araméens dans le yiddish ne sont pas les vestiges d’une ancienne langue parlée par les juifs venus en Europe avec les Romains, mais que les juifs allemands parlaient allemand comme les populations parmi lesquelles ils vivaient jusqu’à l’époque des grandes persécutions. Ce n’est que bien plus tard, aux XIIIème et XIVème siècles, avec la ghettoïsation que les populations juives ont développé leur propre dialecte, basé au départ sur les parlers de la Moyenne-Allemagne, enrichi ensuite de termes de la langue sacrée, enfin plus tard encore lorsque les juifs ont trouvé refuge en Pologne et en Europe de l’Est, de mots d’origine slave (polonais et russes). Le yiddish aurait pu rester au stade d’un dialecte. En principe un dialecte ne devient langue que si on le gèle autoritairement par l’imposition d’un standard, d’une koinè. Si le yiddish s’est stabilisé sous la forme d’une langue commune c’est à cause du besoin qu’ont éprouvé de tout temps les communautés juives ashkénazes de communiquer entre elles (lettres et écrits), de commercer entre elles (donc de voyager) et même de se lier par les liens du mariage. Et puis finalement s’est créée une littérature, la littérature yiddish, qui existe encore aujourd’hui (il y a même un écrivain yiddish, Singer, qui a eu le prix Nobel). Et pourtant le yiddish meurt aussi. Aujourd’hui il a presque disparu en Europe. Les principaux centres qui conservent encore la langue sont l’Amérique du Nord, l’Amérique latine et l’Afrique du Sud. Et la raison principale de la disparition de cette langue n’est ni l’extermination des juifs européens, ni l’interdiction faite par les régimes communistes d’enseigner l’hébreu, ni même le rejet éventuel par les juifs de tout ce qui est allemand. La raison principale c’est l’intégration des juifs dans les nations européennes et leur assimilation linguistique.

A ce sujet voir mon Bloc-notes 2008Le Bund et le yiddish.


N° 3393 Charles A. Ferguson et alia :  Study of the Role of Second Languages in Asia, Africa and Latin America , Frank A. Rice, Washington, 1962

Etudes réalisées pour le Center for Applied Linguistics of the Modern Language Association of America, Washington, D.C.


Argots


N° 2454 Emile Chautard :  La Vie étrange de l'argot , Denoël et Steele, Paris, 1931 (Nombreuses illustrations : Forain, Gavarni, Gill, H. Monnier, etc.)

Ouvrage de référence

N° 3619 Francisque-Michel :  Etudes de Philologie comparée sur l'Argot , Firmin-Didot Frères, 1856 (Ed. originale rare. Demi-chagrin noir d'époque.

Porte sur l'argot et sur les idiomes analogues parlés en Europe et en Asie : argots des voleurs italiens, portugais. Argot espagnol, Rotwelsch, argots anglais, hollandais, jutlandais, russe, argot des médecins charlatans, des boulangers en Albanie, etc. Francisque-Michel était docteur ès-lettres de la Faculté de Paris et de l'Université de Marburg, correspondant de l'Institut et de nombreuses académies étrangères.


N° 1580 Eric Partridge :  Slang. To-day and Yesterday , Bonanza Books, New-York


N° 1574 Hotten (a london Antiquary) :  Dictionary of modern Slang , John Camden Hotten, Londres, 1859 (Edition originale. Original dull purple bead grain cloth)

Sous-titre :  a Dictionary of modern slang, cant and vulgar words . Cant signifie : langage secret. Relation avec langage des gitans. Langage des signes des vagabonds, etc. Intéressant.


Créoles et Pidgins


N° 3864 Jocelyne Dakhlia :  Lingua Franca , Actes Sud, 2008

Sous-titre :  Histoire d'une langue métisse en Méditerranée 

  

N° 3399 Robert A. Jr : Hall :  Pidgin and Creole Languages , Cornell University Press, Ithaca, New-York, 1966

Hall était Professeur de linguistique à Cornell

N° 3400 Dell Hymes et alia :  Pidginisation and Creolization of Languages , Cambridge University Press, Cambridge, UK, 1971

Contributions à la Conférence tenue à l'University of the West Indies de Mona en Jamaïque en avril 1968. Etat actuel de la recherche concernant les pidgins et créoles. Porte surtout sur les créoles anglo-saxons, p. ex. en Inde. Seule étude française : le pidgin vietnamien.


N° 1558 Lafcadio Hearn :  Gombo Zhèbes , Facsimile de l’édition originale Will H. Coleman, New-York, 1885

C’est à La Nouvelle Orléans que Lafcadio Hearn se lance avec délice dans l’exploration des populations noires et métisses et fait une véritable oeuvre d’ethnologue et de linguiste en recueillant des proverbes créoles et même des recettes culinaires. D’ailleurs Gombo est un plat local à base d’ocra. Zhèbes : aux herbes. Son livre de proverbes ne contient pas seulement les dictons collectés en Louisiane mais aussi ceux qu’il a trouvés dans d’autres ouvrages et qui viennent de Martinique, de Haïti, de Guyane, de Trinidad et de Maurice.

Le petit livre de Lafcadio est cité par Morris Goodman qui a fait une thèse de doctorat à l’Université de Columbia portant sur une étude comparative des divers créoles dans le monde. Voir ci-après.En tout cas les travaux de Lafcadio gardent d’autant plus leur intérêt que le créole de La Nouvelle Orléans a probablement disparu aujourd’hui comme celui de Trinidad d’ailleurs (et celui de Grenade antérieurement).

Pour les parlers créoles français voir mon Voyage autour de ma Bibliothèque, Tome 3 : Lafcadio Hearn.


N° 1775 Morris F. Goodman :  A comparative study of Creole French Dialects , Mouton & Co, The Hague, 1964

Goodman compare les cinq groupes linguistiques et géographiques dans lesquels on classe les parlers créoles : Louisiane, Haïti, Antilles, Guyane, Océan Indien. Il cite toutes les théories qui ont été élaborées pour en expliquer la genèse. Sa conclusion est assez étonnante : il considère que l’on a exagéré les influences africaines et régionalistes françaises. Il croit que si des parlers créoles aussi éloignés que ceux de Haïti et ceux de l’Ile Maurice ont autant de points en commun, c’est qu’il y a quelque part une origine commune qu’il voit dans un pidgin qui aurait été parlé par les marchands d’esclaves d’Afrique de l’Ouest.J’avoue mon scepticisme. Que l’origine soit à rechercher en Afrique Occidentale me paraît assez logique. Il est probable que les esclaves importés dans les Mascareignes et aux Seychelles soient venus en majorité de cette région de l’Afrique plutôt que de Madagascar ou de l’Afrique orientale. Mais pourquoi aller chercher un pidgin hypothétique ?


Multilinguisme et traduction


N° 2113 John Edwards :  Multilingualism , Routledge, Londres/New-York, 1994

J. Edwards était Professeur en psychologie à l'Université St. Francis Xavier.Il cherche s’il y a un lien entre multilinguisme et intelligence. Il fait l’historique de la littérature qui a paru à ce sujet. On est passé par plusieurs stades, d’abord une attitude plutôt critique, puis neutre, enfin valorisante (des tests faits au Québec auraient montré que les bilingues avaient de meilleurs résultats aux tests d’intelligence). Edwards dit qu’il ne faut pas prendre ces résultats trop au sérieux (encore que je ne vois pas comment on peut se déclarer intellectuel lorsqu’on ne dispose que d’une bibliothèque monolingue). Il n’y a aucune raison, dit Edwards, que le bilinguisme ait un effet positif ou négatif sur l’intelligence ou les capacités cognitives de l’individu. Par contre, dit-il, il est évident que « le bilinguisme peut représenter une autre dimension de ces capacités et qu’il représente une expansion de son répertoire ».

Ce qui me paraît évident à moi c’est que le multilinguisme représente dans tous les cas un enrichissement culturel. Langue et culture sont trop étroitement liées pour que ce ne soit pas le cas. 


N° 2519 George Steiner :  After Babel, Aspects of Language and Translation , Oxford University Press, Londres, 1975

Steiner était professeur d'anglais et de littérature comparée à Genève. Grand défenseur du multilinguisme. Le livre traite de problèmes de traduction et de communication.Steiner raconte qu’il ne sait absolument pas quelle a été sa première langue. Il se définit comme un authentique trilingue de « naissance », anglais-allemand-français. Son père était originaire de Prague et éduqué à Vienne, et sa mère venait de Galicie, lui-même est né à Paris et a été éduqué à Paris et à New-York. Dans sa famille on avait également l’habitude, comme à Beyrouth, de mélanger les langues, de commencer une phrase et de la finir dans une autre, ou de répondre en français à quelqu’un qui vous avait parlé en anglais. En plus son père y ajoutait de temps en temps quelques mots en tchèque ou en yiddish. Les juifs d’Europe Centrale avaient l’habitude de ces Babels familiers.

Les langues, dit Steiner, rendent les relations entre notre conscience et la réalité « créatives ». Grâce au langage nous construisons ce qu’il appelle « alternities of being ». Pour dire les choses plus simplement, par le langage, nous créons un monde artificiel, celui de nos sensations et de nos idées, nous rejetons « l’inévitabilité empirique du monde ». Et chaque langue crée un monde différent, chaque langue offre sa propre lecture de la vie. En voyageant d’une langue à l’autre, dit Steiner, on éprouve avec émotion cet incroyable besoin de l’esprit humain de s’échapper vers la liberté.


N° 2086 Sélim Abou :  Le Bilinguisme Arabe-Français au Liban , Presses Universitaires de France, 1962

Sélim Abou qui a fait une thèse de doctorat avec le patronage de professeurs émérites : Leroi-Gourhan et Roger Bastide, parle d’un phénomène tout à fait particulier qu’il appelle un surdialecte ; les Libanais de Beyrouth mélangent dans la même phrase des mots et des expressions des deux langues. Peut-être est-ce simplement parce que l’on veut utiliser les avantages des deux : la simplicité, la clarté, le caractère « in » du français et l’imagerie, l’expression populaire de l’arabe. Moi j’avais plutôt l’impression que comme en Alsace il y a 50 ans on utilisait l’arabe (comme nous l’alsacien) pour les choses pratiques de la vie, les plaisanteries, la communication familiale, et le français pour les conversations plus intellectuelles : politique, philosophie, etc. D’autant plus que mon ami Fouad me disait qu’il avait quelques problèmes quand il devait tenir une conversation un peu plus intellectuelle avec des Arabes du Golfe, mais c’était peut-être un problème d’arabe dialectal - arabe classique. Ce qui est certain - et cela était vraiment frappant - c’est que l’on passait constamment d’une langue à l’autre.

A propos de ce bilinguisme arabe-français au Liban (le Liban de l'époque !), voir mon Voyage autour de ma Bibliothèque, Tome 1 : Littérature méditerranéenne.


N° 4365 Bernard Bantoum, Isabelle Poulin et Yves Chevrel :  Histoire des traductions en langue française - XXème siècle , Verdier, Lagrasse, 2019

Volumineuse histoire des traductions (1900 pages), clôturant un ouvrage de 4 tomes sur l'histoire des traductions en langue française. Nombreux contributeurs, sous la direction des trois auteurs nommés. Contient également de nombreuses infos sur les théories de la traduction et de la traductologie.