Voyage autour
de ma Bibliothèque

Liste 67 : Histoire de l’Esclavage

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Victor Schoelcher

N° 2277 Victor Schoelcher :  Esclavage et Colonisation , édit. Presses Universitaires de France, 1948. Introduction par Aimé Césaire. (relié toile)

Victor Schoelcher est né à Paris d’un père alsacien qui était venu s’installer rue Grange-Batelière pour fabriquer des porcelaines. Mais le fils n’a pas dû beaucoup s’intéresser aux affaires de son père. Dès 1830 au retour d’un voyage au Mexique et aux Antilles il commence à s’occuper sérieusement de la question des Noirs et devient journaliste libéral. Dès lors il ne finit pas de mener son combat. Après la révolution de février 1848 il rentre du Sénégal le 3 mars et obtient dès le 4 mars un décret du ministre Arago (le savant chimiste, lui-même abolitionniste) qui institue une commission (Président V. Schoelcher) pour préparer l’émancipation immédiate des esclaves. La commission se réunit dès le lendemain et travaille jusqu’en juillet. Dès le 27 avril 1848 le décret d’abolition est publié. Il donne deux mois pour l’application. Dès le mois de mai les esclaves à la Martinique commencent à se révolter. L’esclavage est aboli officiellement le 23 mai 1848 à la Martinique. Un peu plus tard à la Guadeloupe. Si V. Schoelcher n’avait pas continuellement poussé pour faire passer ses textes immédiatement et attendu la réunion de la Constituante, l’abolition ne serait probablement jamais passée. Trop de forces économiques étaient contre.


N° 2093 Victor Schoelcher :  Vie de Toussaint-Louverture , édit. Paul Olendorff, Paris, 1889. (Relié toile)

Schoelcher était fasciné par Toussaint. Peut-être parce qu’il a montré ce qu’un Noir qui a été esclave jusqu’à l’âge de 50 ans pouvait réussir à faire. Et surtout à tenir tête à Napoléon. Au moment de la Révolution française il y avait 30 000 Blancs (colons et Petits Blancs), 30 000 affranchis Noirs et surtout mulâtres et 700 000 esclaves essentiellement noirs. C’est après de nombreuses péripéties que Toussaint-Louverture monte graduellement en puissance et collabore avec la Constituante. Jusqu’au moment où Bonaparte devient Premier Consul et veut (en 1801) faire revivre les lois (c. à d. l’esclavage) dans les colonies. Il y envoie son beau-frère Leclerc avec 23 000 hommes, un homme d’une cruauté inouïe. Pourtant Toussaint finit par faire la paix avec lui. Celui-ci le fait saisir par trahison un peu plus tard et l’envoie en France. Il meurt de froid dans une forteresse en plein milieu du Jura en 1803. 


Négrier

N° 1881 Théodore Canot :  Confessions d’un négrier , édit. Payot, 1993.

C’est Michel Le Bris qui a retrouvé ce texte il y a quelques années en fouillant dans les archives de Vincennes, texte qu’il avait connu enfant mais pris pour une histoire inventée. En fait il ne nous apprend pas beaucoup plus que ce que nous savions déjà. Les nègres tous entièrement nus, enchaînés par les pieds (du moins les hommes), entassés comme des sardines, couchés sur des planches de bois. Canot prétend les soigner, plus par esprit de lucre que par humanité, mais Schoelcher et beaucoup d’autres estiment que la perte à chaque voyage était d’au moins 25 %. L’histoire de Canot se passe entre 1820 et 1840. Or l’Angleterre avait déjà interdit la traite en 1806 et la plupart des puissances occidentales en 1815 (sauf le Portugal qui l’autorisait dans l’hémisphère Sud). Mais comme disent les douaniers anglais: on ne peut supprimer aucun trafic s’il rapporte plus que 30 %)


Esclavage sud-américain

N° 4657 James Walvin :  Histoire du sucre, histoire du monde , traduit de l’anglais, Ed. La Découverte, Paris, 2020

Le sucre cause principale de l’esclavage. Et de l’obésité à l’époque contemporaine. Le titre anglais est plus explicite : How suggar corrupted the world : from slavery to obesity !


Esclavage nord-américain.

N° 2843 Harriet Beecher Stowe :  La Case de l’Oncle Tom, ou Tableaux de l’esclavage dans les Etats-Unis d’Amérique . Edit. Aux Bureaux du Magasin Pittoresque, Paris, 1853. (Demi-cuir éditeur)

N° 0828 Harriet Beecher Stowe :  Uncle Tom’s Cabin, or Life among the Lowly . Grosset-Dunlop, New-York. (Hard cover)

N° 3290 Harriet Beecher Stowe :  The Key to Uncle Tom’s Cabin, presenting the original facts and documents on which the story is founded , Clarke, Beeton and Co/Thomas Bosworth, Londres, 1853 (reliure originale de l’éditeur)

Présente les faits et documents qui justifient l'œuvre. Etude de l'esclavage et de ses lois. Le commerce des esclaves. La relation avec les églises.  Témoignages.


 Uncle Tom's Cabin  est publié en 1851 et a tout de suite un écho considérable pas seulement aux Etats-Unis mais également en Europe (mon édition en français date de 1853). Qui est Mrs Beecher-Stowe ? Son père était forgeron à l’origine puis après des études à Yale devint docteur et pasteur. Il va diriger un séminaire à Cincinnati où va également enseigner le mari de Harriet, le révérend Stowe. Or la ville va devenir un champ de bataille entre abolitionnistes et esclavagistes. Le séminaire est fermé. La famille repart vers l’Est. C’est également l’époque à laquelle est votée la Fugitive Law, loi qui permet d’attraper dans les Etats du Nord un esclave enfui du Sud par respect du droit de propriété ! Cela a dû déclencher la sainte colère de Mrs Stowe et la décider à faire oeuvre d’écrivain. Contrairement à ce qu’on pourrait croire le livre est un argumentaire parfaitement conçu pour renverser l’opinion publique : beaucoup d’exemples d’enfants arrachés à leurs mères (il y avait d’ailleurs de véritables élevages de nègres en Virginie), des couples rompus, les conjoints obligés de se mettre avec de nouveaux partenaires, des filles vendues pour servir à la lubricité de leurs maîtres ou destinées à des maisons spécialisées à La Nouvelle Orléans, des maîtres bruts et sauvages mais pas tous, au contraire, beaucoup de maîtres ordinaires, pas spécialement méchants, un peu veules (il y a beaucoup de Français parmi ces gens du Sud, n’est-ce pas) et puis la catastrophe : la vente aux enchères de tout le cheptel suite au décès du maître ou en cas de faillite. Les gens du Nord ne sont pas épargnés, on leur reproche leur racisme latent (la cousine Ophélie du Vermont qui n’arrive pas à se forcer à caresser la petite Noire, la fille Toby). On attaque aussi les gens d’église qui justifient l’esclavage en s’appuyant sur la Bible (on revient là à la fameuse malédiction jetée par Noé sur Cham).Alors on peut penser que ce livre a quand même eu un certain effet et que c’est peut-être à cause de lui que Lincoln, qui, s’il était mou, était malgré tout contre l’esclavage, a été élu Président en 1860, ce qui a entraîné toute la suite.


N° 3441 Gustave de Beaumont :  Marie ou l’esclavage aux Etats-Unis, Tableau de mœurs américaines , Libr. Charles Gosselin, Paris, 1835 (3ème édition revue et corrigée. Relié demi-cuir, dos lisse).

Plutôt un document qu'un roman sur l'esclavage aux Etats-Unis. Gustave de Beaumont avait accompagné Tocqueville en Amérique et avait été l'un des auteurs du  Système pénitentiaire aux Etats-Unis . Nombreuses notes et appendices traitant de la situation sociale et politique non seulement des esclaves mais également des affranchis, des femmes et des Indiens.


N° 2541 William Still :  The Underground Rail Road, a record . Porter & Coates, Philadelphia, 1872. (Hard cover)


N° 1949 Claude Julien :  Le Rêve et l’Histoire. Deux Siècles d’Amérique . Edit. Grasset, Paris, 1976.


La constitution de 1776 disait : tous les hommes naissent égaux. Mais les Noirs n’étaient pas des hommes. Les Etats-Unis n’ont pas eu de Schoelcher. Claude Julien donne une image bien triste de Lincoln. Attentiste comme tous ceux qui avaient le pouvoir et qui étaient plutôt contre l’esclavage depuis l’indépendance, il voulait des délais, il restait persuadé de la supériorité du Blanc et ce qui comptait avant tout pour lui ce n’était pas les principes mais le maintien de l’Union. La Guerre de Sécession n’a pas été déclenchée par une loi sur l’esclavage mais par le retrait des Etats du Sud après l’élection de Lincoln Président (Caroline du Sud, Mississipi, Floride, Alabama, Géorgie, Louisiane, et finalement Texas). Ce n’est que bien plus tard, à la fin de la guerre, après la réélection de Lincoln, en 1865, que le 13ème Amendement est voté, abolissant l’esclavage. Et un peu plus tard le 14ème Amendement (Le Noir doit être jugé dans un procès régulier) et le 15ème (il ne sera pas privé de son droit de vote). On sait ce qu’il en est advenu dans les Etats du Sud. Et qu’il a fallu attendre 100 ans de plus. Mais ceci est une autre histoire...

Il y a malgré tout des gens qui se sont battus et qui ont pris des risques. Le Livre sur  l’Underground Rail Road  n’est pas très intéressant car il n’explique pas son véritable fonctionnement mais recense tous les esclaves qui ont réussi à fuir et leurs histoires. Il mentionne aussi les principaux supports de l’organisation. Les Quakers sont en première ligne. Un mémoire contre l’esclavage est envoyé par eux aux membres du Congrès dès 1789. Harriet Tubman, une esclave qui a réussi à s’échapper est une des grandes figures du Chemin de Fer souterrain. Des sociétés anti-esclavagistes existent en 1830 dans le Nord comme dans le Sud. William Lloyd Garrison, un Baptiste de Nouvelle-Angleterre a eu une très grosse influence (et en particulier sur les Noirs) avec un journal créé à Boston en 1831, le Liberator, qu’il a continué jusqu’à la fin de la Guerre de Sécession. Un pasteur presbytérien, Lovejoy, journaliste lui aussi, est lynché par la foule dans l’Illinois à cause de ses articles. Les hommes du Chemin de Fer avaient tous des fonctions précises : Station Master on the Road, Chief Engineer of the Southern End, Conductor, etc. L’un des Conductors, un Noir, Samuel Burris, est attrapé dans le Delaware et condamné à 7 ans d’esclavage. Ce sont les amis du Rail Road qui ont avancé l’argent pour l’acheter à la vente aux enchères et le ramener à Philadelphie.


Pour plus de détails (Schoelcher, Toussaint-Louverture, Harriet Beecher-Stowe et le Underground Railway) voir mon Voyage autour de ma Bibliothèque, Tome 1 : Littérature brésilienne, syncrétisme religieiux et esclavage.