Voyage autour
de ma Bibliothèque

Liste 20 : Ecrivains roumains

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Istrati


N° 1294 Panaït Istrati :  Les Récits d’Adrien Zograffi : Kyra Kyralina - Oncle Anghel - Présentation des Haïdoucs - Domnitza de Snagov , préfaces de Joseph Kessel et de Romain Rolland, édit. Gallimard, Paris, 1968.

N° 1297 Panaït Istrati :  La jeunesse d’Adrien Zograffi : Codine - Mikhaïl - Mes Départs - Le Pêcheur d’éponges , édit. Gallimard, Paris, 1968.

N° 1296 Panaït Istrati :  La vie d’Adrien Zograffi : La Maison Thüringer - Le Bureau de Placement - Méditerranée (lever du soleil) - Méditerranée (coucher du soleil) , préface de Istrati, édit. Gallimard, Paris, 1969.

N° 1295 Panaït Istrati :  Les Chardons du Baragan - Tsatsa-Minnka - Nerrantsoula - La Famille Perlmutter (avec Josué Joshuda) - Pour avoir aimé la Terre , édit. Gallimard, Paris, 1970.

Difficile de ne pas tomber sous le charme de ce conteur oriental génial qui a eu le culot extraordinaire d'écrire directement en français alors que c'était une langue qu'il ne connaissait que depuis peu et qu'il gisait dans un hôpital à Lausanne, et avait un autre culot, celui de s'adresser directement à Romain Rolland qu'il admirait, culot bien payant d'ailleurs puisque celui-ci l'a guidé et soutenu plus tard, sans hésiter, et sans le connaître, sur la simple foi des épîtres qu'il en avait reçues. Au fond il faudrait le classer avec les écrivains francophones !

Mais c’est aussi un homme de passion, passion pour la justice, pour la beauté, la beauté de sa terre (la plupart de ses histoires se passent aux alentours de Braïla, entre Braïla et Galatz, une région que l’on appelle aussi l’embouchure ou le delta parce qu’elle se trouve là où le fleuve Siret se jette dans le Danube créant un univers d’eau, de marécages, d’étangs, de joncs), un homme de coeur qui aime les faibles, les opprimés, les enfants (que d’enfants dans ses histoires : dans  Codine , dans  Kyra , dans  les Chardons , dans  Nerrantsoula , etc.), les chiens (qu’on retrouve souvent avec les enfants d’ailleurs), un homme qui ne peut vivre sans l’amitié.

Dans  Kyra Kyralina  est racontée la jeunesse de Stavro. Il s’appelait alors Dragomir, quand il s’embarque avec sa soeur sur un beau voilier à Braïla, trompé par celui qui se présente à eux en gentleman, Nazim Effendi, turc et fournisseur de chair de harem. Cosma, le haïdouc, est un personnage de légende, que l’on trouve dans  l’Oncle Anghel , et puis dans la  Présentation des Haïdoucs , et enfin dans l’histoire de cette haïdouc féminine, belle, sensuelle, intelligente, forte, une capitaine de haïdoucs, Floarea (la fleur) Codrilor qu’on va retrouver dans  Domnitza de Snagov 

 Codine  est un ancien forçat, devenu l’ami de l’enfant Adrien, un homme d’une stature monstrueuse, terreur de sa mère, une vieille harpie, qui lui refuse la vente d’un lopin de terre et qui, un jour, le tue de cette manière horrible : en lui versant pendant son sommeil, dans sa bouche ouverte, deux litres d’huile bouillante. 

 Les Chardons du Baragan  sont un des chefs d’œuvre d’Istrati. Les chardons géants qui couvrent le plateau du Baragan à perte de vue et qui soudain s’en vont cassés puis chassés par le vent d’automne, le vent qui souffle de Russie, le crivatz, et puis les enfants qui s’en vont à leur tour courir avec le vent, avec les chardons qui piquent, jusqu’à l’horizon, jusqu’à l’épuisement, jusqu’au soir.


N° 1298  Panaït Istrati, notre contemporain - Le Livre du Centenaire 1884-1984 , édit. Les Amis de Panaït Istrati - Edisud, Aix-en-Provence, 1986.

Istrati est un homme de passion. Mais cela ne l’empêche pas de voir la réalité, de comprendre. La passion lui permet de sentir les êtres humains plutôt que les systèmes, voir à travers les apparences et atteindre la vérité. Il n’est pas dupe comme Kazantzaki et tous les autres intellectuels des systèmes et des idéologies. Il revient d’URSS avec un livre terrible :  Vers l’autre flamme  et est probablement l’un des premiers sinon le premier des écrivains ou intellectuels de gauche à fournir un si accablant témoignage contre le communisme soviétique.


Pour plus de détails concernant Istrati et son oeuvre, voir mon Voyage autour de ma Bibliothèque, Tome 2 : I comme Istrati et Littérature de Roumanie et des Balkans. Voir aussi mes Carnets d'un dilettanteMon ami Istrati.


N° 1293 Mircea Eliade :  Les Hooligans , édit. l’Herne, Paris, 1987. (Relié toile)

( Les Hooligans  est un roman de jeunesse, datant de 1935, du mythologue et historien des religions Mircea Eliade. Dans ce roman il montre la jeunesse dorée de Bucarest, une jeunesse plutôt libre sur le plan des moeurs, égoïste, amorale et travaillée, du moins pour certains, par les idées fascistes).


N° 1300 Constantin Virghil Gheorghiu :  25 Uhr , transposé à partir de la publication en français par Leonore Schlaich, Deutsche Verlags-Anstalt, Stuttgart, 1952 (Reliure lin de l’éditeur)

N° 1301 C. Virgil Gheorghiu :  La vingt-cinquième heure , traduction Monique Saint-Côme, préface Gabriel Marcel, Plon, 1949 (Relié toile)

La parution de  La Vingt-cinquième Heure , tout de suite après la guerre, a été un événement important, aussi important que le  J’ai choisi la liberté  de Kravchenko. C’est l’histoire d’une espèce de soldat Schweik, un simple paysan, un certain Iohann Moritz qui, accusé par un gendarme qui convoitait sa femme, d’être juif, est d’abord emprisonné dans un camp de travail en Roumanie, puis ayant passé la frontière hongroise avec quelques Juifs fortunés qui l’utilisent comme porteur de bagages puis l’abandonnent, est torturé et emprisonné par les Hongrois qui le soupçonnent d’être un espion roumain, avant d’être vendu par les Hongrois avec 50 000 autres étrangers aux Allemands comme travailleur forcé, croupit alors dans un camp de travail allemand, s’en échappe avec d’autres prisonniers à l’approche des Américains qui le mettent à leur tour en prison parce que les Roumains étaient alliés des Allemands pendant la guerre et qu’il est donc le citoyen d’un pays ennemi...

A ceci viennent s’ajouter d’autres expériences pas plus joyeuses : le village dont est originaire Iohann est pris par les Bolchéviques qui condamnent à mort le maire, le gendarme (c’est bien fait pour lui), le pope et quelques paysans plus fortunés que les autres ; le fils du pope qui est écrivain, qui a épousé une Juive et qui pour la sauver a accepté un poste diplomatique quelque part dans les Balkans, est emprisonné après la guerre avec sa femme par les Croates d’abord puis par les Américains, eux aussi à cause de leur citoyenneté roumaine ; et la femme de Iohann qui s’échappe de Roumanie, est rattrapée par les Russes et violée chaque nuit devant ses enfants par un bataillon entier...

Quand on relit le roman aujourd’hui on s’aperçoit qu’il y a pas mal de relents antisémites (les Juifs n’ont jamais le beau rôle dans cette histoire) et qu’il est plutôt anti-occidental : les prisons américaines sont décrites plus longuement que celles des Allemands, les Américains refusent de s’intéresser aux cas particuliers, ils font confiance au «système» et la troisième guerre mondiale qui s’annonce est considérée par Gheorghiu comme une guerre de la civilisation occidentale, « mécanique », contre « une de ses branches ».


N° 1299 Camil Petrescu :  Madame T. , édit. Jacqueline Chambon, Nîmes, 1990. (Relié toile)

(Petrescu est un des grands écrivains roumains de l’entre-deux guerres. Il était poète et dramaturge et n’a écrit que deux romans dont un porte le titre évocateur :  Dernière nuit d’amour, première nuit de guerre . C’est en 1933 qu’il publie  Madame T.  Ce roman décrit lui aussi les milieux bourgeois de Bucarest des années trente. Il est d’une forme tout à fait originale, moitié épistolaire. Et en filigrane apparaît un superbe portrait de femme !)


N° 2758 Gib I. Mihaescu :  La Femme Russe , édit. Jacqueline Chambon, Nîmes, 1997. (Relié toile)

(Les Roumains sont décidément de grands admirateurs de « la femme ». La même année (1933) paraît  la Femme Russe . C’est vraiment l’âge d’or de la littérature roumaine. Car ce roman est un vrai chef d’oeuvre. On pense immanquablement au  Désert des Tartares  : le lieutenant Ragaïac, installé avec son détachement au bord du Dniestr pour garder la frontière, observe tous les jours la terre russe qui s’étend de l’autre côté, une terre où se passent des événements dont on ne sait rien, et s’imagine que va sortir du brouillard, et plus tard des neiges et des glaces, une femme russe rêvée… Et elle va arriver effectivement…)


Pour tous ces écrivains, voir mon Voyage autour de ma Bibliothèque, Tome 2 : Littérature de Roumanie et des Balkans.